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Les glaciers fondent, c’est un horizon qui se désagrège. Tout l’été 2024, une grande exposition suisse, intitulée Regarder le glacier s’en aller (curation Bernard Fibischer), convie une septantaine d’artistes à interroger les profondes mutations de ce paysage naturel et culturel.

A l’invitation du Musée valaisan des Bisses, à Ayent et du festival Lucens Classique, au Château de Lucens, le poète Thierry Raboud présente pour la première fois Ecographies, série qui réhabilite le typewriter art, cette manière de créer des images en assemblant des caractères à la machine à écrire.

En-deçà du langage, car les mots parfois manquent face à ce qui nous dépasse, ses tableaux typographiques offrent un regard inédit, ironique parfois, poétique souvent, sur le désastre environnemental en cours.

A la croisée des sciences et des arts, mêlant codage analogique et algorithmique, données scientifiques et intuitions poétiques, la série Ecographies renouvelle l’imagerie de l’écosystème planétaire en redonnant au langage toute sa force de frappe.

Le diptyque intitulé Feu la mer est basé sur les instructions d’un livre anglais publié en 1982, Bob Neill’s Book of Typographic art, qui donne la marche à suivre pour créer un tableau représentant la mer de Glace. L’artiste confronte cet état ancien du glacier à une photographie prise du même point de vue en 2023, traduite numériquement en paysage de caractères puis transcrite à la machine selon le même protocole.


Glacier reprend ce paysage mais en démembrant les mots montagne et roche tout inscrivant en creux la présence disparue.


Merci de laisser, ironiquement composé sur un coupon de papier hygiénique, met en scène la dimension cyclique et collective de la responsabilité écologique.


Rester terrestre / Se tirer – s’étirer – rêver


Martyrologe est une installation réalisée en collaboration avec l’EPFZ et MétéoSuisse, qui déroule la liste inédite des 1353 glaciers disparus en Suisse entre 1973 et 2016. Sur un grand rouleau de papier Japon, les noms se succèdent dans les quatre langues nationales, toponymie de la fonte calquée sur la courbe des températures journalières pour l’année 2023, la plus chaude jamais enregistrée. Composé à l’aide d’une machine à écrire de grand format précédemment utilisée par une compagnie de trains de montagne pour inscrire ses tableaux d’horaires, c’est un nouveau relief qui dessine sur ces 365 lignes que complète une pluie d’apostrophes, image du dégel et de l’élision.


L’ensemble On savait pas reprend cette formule populaire du déni pour la transcrire avec, en filigrane, le premier rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), en 1990, où tout était déjà écrit.